Comment s'y prennent les araignées pour tisser leurs toiles ?
Dans la campagne, les toiles d'araignée tendues entre les arbres constituent des obstacles plutôt désagréables pour le promeneur. Mais comment sont-elles arrivées là ?
Comment une araignée parvient à tendre un fil entre deux arbres éloignés de plusieurs mètres ? Comment tissent-elles les toiles qui leur servent de piège ? Voyons cela en détail et en images.
Précisons que l'on s'intéresse ici aux araignées «orbitèles», à «toiles géométriques», et non aux autres araignées, qui tissent des toiles informes, ou en forme de cornet. Dans cette catégorie se rangent toutes les araignées du genre «Épeire», dont l'Épeire diadème, ainsi que les «Argiopes» dont l'Argiope Frelon qui a fait l'objet d'un article sur ce site.
Tout d'abord, il faut tendre un fil entre deux points fixes. Soit une prairie de hautes herbes, ou tout autre type de support : murs, branches, carcasses d'acier. Comment faire pour aller d'un point A à un point B ? C'est très simple : c'est le fil qui va y aller tout seul. En effet, ce n'est pas l'araignée qui se déplace : elle se contente de laisser partir dans le vent le fil qu'elle sécrète à l'aide des glandes de son abdomen appelées «filières». Le fil est tellement léger qu'il peut flotter dans l'air sur des distances respectables. Ainsi, un fil de soutènement de toile peut faire jusqu'à cinq mètres de long, et passer par dessus des chemins, des obstacles ou même des rivières. Lorsque le fil atteint l'obstacle, il s'enroule sous l'effet du vent à la moindre branchette ou au plus petit brin d'herbe qui dépasse.
Il ne reste plus à l'araignée qu'à faire un aller retour sur ce pont suspendu. Elle en profite en général pour en remettre une couche. Au bout de quelques semaines, ces fils de support peuvent être très épais, car ils sont renforcés régulièrement.
Puis, il faut fabriquer le cadre extérieur de la toile
Le cadre de la toile est une sorte de cerceau suspendu à la végétation.
Lorsqu'elle dispose d'un solide fil de soutènement, l'araignée fabrique le cadre extérieur de sa toile en collant des fils aux herbes ou aux branches.
Il faut maintenant passer à la seconde étape : les rayons, en les attachant au centre avec un premier petit cercle de plusieurs brins de soie. L'araignée utilise toujours pour cette première partie de la construction son fil le plus solide, un fil assez épais et peu collant. Il faut préciser tout de suite que l'animal dispose d'une mini-usine chimique très élaborée, puisqu'elle peut à loisir changer de qualité de fil en utilisant une autre des filières présentes à l'arrière de son abdomen. Elle peut aussi tisser des fils simples, doubles ou multiples en faisant fonctionner une ou plusieurs filières à la fois.
Étape suivante : le moyeu
Lorsque tous les rayons sont en place, l'araignée repart au centre de la toile pour y tisser le moyeu. Il s'agit d'une zone ou les fils très serrés sont disposés en spirale à partir du centre. C'est là que se trouvera le futur poste de guet. Il est toujours tissé avec du fil solide et peu collant. Il sert surtout à lier ensemble tous les rayons de la toile afin d'assurer la suite du tissage. En partant du centre, l'araignée pose des fils en spirale serrée, les collant les uns aux autres en utilisant une autre de ses filières qui produit cette fois un fil ultra-fin et collant comme de la glu. 
Le moyeu terminé ressemble cette image
Il faut maintenant tisser l'armature de la toile. Pour cela, on s'écarte un peu du moyeu, et on enroule un fil solide en spirale lâche jusqu'au bord de la toile.
Pour réussir une toile bien régulière, l'araignée se sert de ses pattes comme d'un compas, dont l'écartement constant lui permet de maintenir la distance à chaque fois qu'elle colle un fil aux rayons à l'aide de sa soie adhésive ultra fine. Le résultat obtenu est une toile aux spires très lâches, mais solide, qui va servir d'échafaudage pour terminer l'ouvrage.
L'araignée peut maintenant circuler librement sur sa toile qui est assez solide pour cela. Mais il y a un problème : les barreaux du piège sont beaucoup trop écartés, et les fils ne sont pas assez collants et trop visibles. Autant dire que si une mouche se précipite sur la toile, elle va passer entre les barreaux très facilement.
Le tissage de la soie piège Voilà pourquoi l'araignée va maintenant détruire petit à petit la spirale qu'elle vient de poser et en coller une autre beaucoup plus serrée, en partant de l'extérieur. Cette nouvelle spirale est constituée d'une soie tout à fait différente : il s'agit d'un fil double, moins solide et assez fin comparé au premier. Mais ce nouveau fil est bien plus collant car il est recouvert de très nombreuses gouttelettes de colle. On voit sur l'illustration ci-contre la spirale définitive dans la zone marginale de la toile et la vieille spirale de consolidation dans la zone centrale, en cours de destruction.
Lorsque la toile est terminée, elle ressemble à la photo ci-contre. La taille du moyeu et l'écartement des rayons et des spires varient beaucoup en fonction des espèces, comme la taille de la toile. Par contre, il y a toujours une zone libre entre le moyeu et la partie collante de la toile, ou au moins des trous au centre. Les trous de cette «zone libre» servent à passer d'un coup de patte de l'autre côté de la toile. Sinon, il faudrait à chaque fois que l'araignée fasse le tour. Et ça ne serait pas très pratique.
Quelques détails…
• L'araignée recommence à tisser sa toile tous les matins, voire deux fois par jour. En effet, la toile est fragile et un simple vol de moineau la détruit. D'autre part, une toile neuve est presque invisible, tandis qu'une vieille toile est couverte de poussière… et perd de son efficacité collante.
• Pour voir les toiles, choisissez de préférence le matin, lorsque la rosée s'accroche aux fils et les rends visibles.
• Rien ne se perd, tout se récupère… C'est pour cela que lorsque l'araignée recommence une nouvelle toile, elle fait d'abord une boulette de la vieille toile et l'avale. En moins d'une heure, celle-ci est digérée et transformée en substance prête à l'emploi. Elle fait de même lors de la fabrication, au moment où elle détruit la première spirale pour en construire une deuxième plus serrée et collante.
• Le câble primaire de la toile d'araignée est une substance incroyable : à section égale, ce câble est deux fois plus solide que de l'acier, et quatre fois plus élastique. Certains essais de tissage réalisés en laboratoire ont montré qu'un tissu réalisé en fils d'araignée est plus résistant que le Kevlar qui est une fibre synthétique utilisée notamment dans les gilets barre-balle et dans l'industrie aéronautique.
Photos et illustrations de l'auteur. Tous droits réservés.
Comment une araignée parvient à tendre un fil entre deux arbres éloignés de plusieurs mètres ? Comment tissent-elles les toiles qui leur servent de piège ? Voyons cela en détail et en images.
Précisons que l'on s'intéresse ici aux araignées «orbitèles», à «toiles géométriques», et non aux autres araignées, qui tissent des toiles informes, ou en forme de cornet. Dans cette catégorie se rangent toutes les araignées du genre «Épeire», dont l'Épeire diadème, ainsi que les «Argiopes» dont l'Argiope Frelon qui a fait l'objet d'un article sur ce site.
Tout d'abord, il faut tendre un fil entre deux points fixes. Soit une prairie de hautes herbes, ou tout autre type de support : murs, branches, carcasses d'acier. Comment faire pour aller d'un point A à un point B ? C'est très simple : c'est le fil qui va y aller tout seul. En effet, ce n'est pas l'araignée qui se déplace : elle se contente de laisser partir dans le vent le fil qu'elle sécrète à l'aide des glandes de son abdomen appelées «filières». Le fil est tellement léger qu'il peut flotter dans l'air sur des distances respectables. Ainsi, un fil de soutènement de toile peut faire jusqu'à cinq mètres de long, et passer par dessus des chemins, des obstacles ou même des rivières. Lorsque le fil atteint l'obstacle, il s'enroule sous l'effet du vent à la moindre branchette ou au plus petit brin d'herbe qui dépasse.
Il ne reste plus à l'araignée qu'à faire un aller retour sur ce pont suspendu. Elle en profite en général pour en remettre une couche. Au bout de quelques semaines, ces fils de support peuvent être très épais, car ils sont renforcés régulièrement.
Puis, il faut fabriquer le cadre extérieur de la toile
Le cadre de la toile est une sorte de cerceau suspendu à la végétation.Lorsqu'elle dispose d'un solide fil de soutènement, l'araignée fabrique le cadre extérieur de sa toile en collant des fils aux herbes ou aux branches.
Il faut maintenant passer à la seconde étape : les rayons, en les attachant au centre avec un premier petit cercle de plusieurs brins de soie. L'araignée utilise toujours pour cette première partie de la construction son fil le plus solide, un fil assez épais et peu collant. Il faut préciser tout de suite que l'animal dispose d'une mini-usine chimique très élaborée, puisqu'elle peut à loisir changer de qualité de fil en utilisant une autre des filières présentes à l'arrière de son abdomen. Elle peut aussi tisser des fils simples, doubles ou multiples en faisant fonctionner une ou plusieurs filières à la fois.
Étape suivante : le moyeu
Lorsque tous les rayons sont en place, l'araignée repart au centre de la toile pour y tisser le moyeu. Il s'agit d'une zone ou les fils très serrés sont disposés en spirale à partir du centre. C'est là que se trouvera le futur poste de guet. Il est toujours tissé avec du fil solide et peu collant. Il sert surtout à lier ensemble tous les rayons de la toile afin d'assurer la suite du tissage. En partant du centre, l'araignée pose des fils en spirale serrée, les collant les uns aux autres en utilisant une autre de ses filières qui produit cette fois un fil ultra-fin et collant comme de la glu. Le moyeu terminé ressemble cette image
Il faut maintenant tisser l'armature de la toile. Pour cela, on s'écarte un peu du moyeu, et on enroule un fil solide en spirale lâche jusqu'au bord de la toile.
Pour réussir une toile bien régulière, l'araignée se sert de ses pattes comme d'un compas, dont l'écartement constant lui permet de maintenir la distance à chaque fois qu'elle colle un fil aux rayons à l'aide de sa soie adhésive ultra fine. Le résultat obtenu est une toile aux spires très lâches, mais solide, qui va servir d'échafaudage pour terminer l'ouvrage.
L'araignée peut maintenant circuler librement sur sa toile qui est assez solide pour cela. Mais il y a un problème : les barreaux du piège sont beaucoup trop écartés, et les fils ne sont pas assez collants et trop visibles. Autant dire que si une mouche se précipite sur la toile, elle va passer entre les barreaux très facilement.
Le tissage de la soie piège Voilà pourquoi l'araignée va maintenant détruire petit à petit la spirale qu'elle vient de poser et en coller une autre beaucoup plus serrée, en partant de l'extérieur. Cette nouvelle spirale est constituée d'une soie tout à fait différente : il s'agit d'un fil double, moins solide et assez fin comparé au premier. Mais ce nouveau fil est bien plus collant car il est recouvert de très nombreuses gouttelettes de colle. On voit sur l'illustration ci-contre la spirale définitive dans la zone marginale de la toile et la vieille spirale de consolidation dans la zone centrale, en cours de destruction.
Lorsque la toile est terminée, elle ressemble à la photo ci-contre. La taille du moyeu et l'écartement des rayons et des spires varient beaucoup en fonction des espèces, comme la taille de la toile. Par contre, il y a toujours une zone libre entre le moyeu et la partie collante de la toile, ou au moins des trous au centre. Les trous de cette «zone libre» servent à passer d'un coup de patte de l'autre côté de la toile. Sinon, il faudrait à chaque fois que l'araignée fasse le tour. Et ça ne serait pas très pratique.
Quelques détails…
• L'araignée recommence à tisser sa toile tous les matins, voire deux fois par jour. En effet, la toile est fragile et un simple vol de moineau la détruit. D'autre part, une toile neuve est presque invisible, tandis qu'une vieille toile est couverte de poussière… et perd de son efficacité collante.
• Pour voir les toiles, choisissez de préférence le matin, lorsque la rosée s'accroche aux fils et les rends visibles.
• Rien ne se perd, tout se récupère… C'est pour cela que lorsque l'araignée recommence une nouvelle toile, elle fait d'abord une boulette de la vieille toile et l'avale. En moins d'une heure, celle-ci est digérée et transformée en substance prête à l'emploi. Elle fait de même lors de la fabrication, au moment où elle détruit la première spirale pour en construire une deuxième plus serrée et collante.
• Le câble primaire de la toile d'araignée est une substance incroyable : à section égale, ce câble est deux fois plus solide que de l'acier, et quatre fois plus élastique. Certains essais de tissage réalisés en laboratoire ont montré qu'un tissu réalisé en fils d'araignée est plus résistant que le Kevlar qui est une fibre synthétique utilisée notamment dans les gilets barre-balle et dans l'industrie aéronautique.
Photos et illustrations de l'auteur. Tous droits réservés.
